3. Le couple Créateur-Créature, une vision dualiste ?

3. Le couple Créateur-Créature, une vision dualiste ?

Voici le troisième, et dernier article de cette série sur la question du Créateur et de la Créature selon ma compréhension…

Vous n'aurez pas manqué de percevoir une certaine vision dualiste dans ma conception de Dieu et de l'Existence qui peut évoquer une influence de la gnose.
C'est possible, mais je crois plutôt que le gnosticisme que l'on connait et qui s'est développé dans la Palestine autour de l'ère chrétienne est le fruit d'une réflexion comparable à la mienne (non, je ne compare pas la qualité de mon esprit avec celui des pères de ce très important courant qui a notamment contribué à la naissance du christianisme, je dis juste que la base de réflexion est peut-être la même). Il est possible que la conception de Dieu et de l'existence ait été révisée à l'une des époques de la construction du judaïsme, peut-être autour des règnes de David et de Salomon à l'époque de la construction du Temple et de la centralisation de la religion et que plusieurs tendances se soient développée en marge de celle que l'on connait aujourd'hui. Ces conceptions marginales ayant alors donné naissances aux hérésie gnostiques et autres (hérésie ici a le sens de conception marginale qui s'oppose à la politique qui s'impose alors). La conception monothéiste moderne, la lecture officielle de la Thorah, a forcément été influencée par la réaction politique en prise avec le développement de ces hérésies (une conception réactionnaire donc).
Le résultat a été une radicalisation du monothéisme, et un foisonnement d'idées marginales, voire fantaisistes, qui se sont développées comme elles ont pu dans un milieu hostile et révisionniste. Cela donne que les idées dominantes ont du être élaborées au service d'une politique qui n'avait rien à voir avec l'enseignement de la tradition d'origine.

On confond souvent opposition et conflit. Dans le couple, l'opposition entre les deux pôles structure ce couple, et il faut se souvenir que l'opposition entre le créateur et la créature, souvent perçue comme bon (spirituel) pour le premier et mauvaise (matérielle) pour la seconde engendre ce que l'on nomme depuis Amour. On dit que Dieu aime le monde. Le monde, c'est l'existence, YHVH dans notre interprétation. AL, Dieu, émet, et YHVH jouit de cet émission créatrice, fécondatrice. YHVH incarne le plaisir… YHVH est une entité féminine passive et heureuse, et son mystérieux amant ne s'en lasse pas. Il est inutile de développer le processus qui a fait que les sociétés devenues patriarcales aient fait de cette féminité et de ce bonheur le facteur du mal, un mal qu'elles ont du inventer de toute pièce faute de le trouver en dehors des esprits malades de leurs chefs.

La capacité d'auto-génération de YHVH et le 3° homme
Ainsi perpétuellement fécondée par Al, ou Elohim, YHVH se développe, s'étend à l'infini. Je parle dans la deuxième partie de cet article de sa capacité à s'auto-générer. En effet, les alchimistes ont bien l'impression d'observer une expansion de l'univers dans leur travaux et l'influence première aidant continuellement, comme ex nihilo. Le germe créateur se développe en son sein même et le phénomène de création de l'univers s'y reproduit sans cesse. C'est ce que l'homme considère comme un privilège, voire un devoir, que de développer en lui ce Dieu Créateur, se diviniser.
C'est pourquoi l'on fait cas pour nous aussi du Père Suprême dans nos panthéons et que Elohim côtoie YHVH dans les listes de noms sacrés (sinon, que faire du nom d'un Dieu qui n'existe pas ?).
À chaque niveau de l'existence se joue, ou se rejoue, le mystère suprême…

Les autres Noms Divins…
Si, dans ma façon de présenter les choses, je fais une place à part au couple primordial Créateur-Créature, je n'ignore pas les déclinaisons de ces forces que l'on range dans les "Noms Divins" et qui sont tous du domaine de l'existence (YHVH). La première chose à se souvenir est que les kabbalistes considèrent souvent que tous les noms, tous les mots de la Thorah sont quelque part des noms divins et que par extension, chaque lettre, chacune des 22 Authioth (lettres) est un "nom de Dieu". Pour résumer, on retrouve ici la conception développée plus haut que toute la création (YHVH), dont les lettres forment la substance, est divine.
Sélectionnons quelques uns parmi ces noms…
Adonaï : "Mon Seigneur", de Adon, Seigneur (peut aussi s'employer pour un supérieur social). Dans la lecture, Adonaï se substitue au nom que l'on ne prononce pas à la légère : YHVH.
AGLA : acronyme de Atah Guibor LeOlam Adonaï, "Tu es fort éternellement mon Seigneur". On se souviendra que le A final est l'inital de Adonaï qui est la substitution du tétragramme sacré (YHVH) et devrait peut-être être modifié. Ce nom est une emphase du précédent.
Shaddaï : L'un de mes préférés, se traduit habituellement par "Puissant", ce qui est un indice de la patriarcalisation de la théologie hébraïque puisque Shadi signifie "Sein". Shadaï devrait donc se traduire par "Fertile". Cela se vérifie avec les Shéddim (pluriel masculin pourtant) qui sont les esprits de la nature que l'on trouve très fréquemment dans le Cantique des cantiques. Ce nom se développe souvent en "Shadaï El Ch'aï" (littéralement : "fertile la vie").
Cela nous fait quatre noms fondamentaux : Elohïm (ou Al &c…), le créateur suprême ; YHVH (ou YH &c…), la créature suprême ; Adonaï, mon Seigneur ; et Shaddaï, mon fertile (mais j'aurais tendance à dire ma fertile).

Le père, la mère, le fils, et la fille : une famille modèle (je plaisante gentiment sur cette image, et ça me permet de conclure pour aujourd'hui).

M.L. Mai 2016